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« Pensez-vous que la plongée sous-marine est un sport dangereux ? »
Câest la question que nous posions aux camarades de classes de la padawan Lucie et Ă leur famille. Il sâagit dâune question parmi une dizaine dâautre, mais le rĂ©sultat nous a interpelĂ©. Sur 97 rĂ©pondants, 65% considĂšrent la plongĂ©e comme un sport dangereux.
Il ne sâagit Ă©videmment pas de nier que lâactivitĂ© plongĂ©e comporte un certain nombre de dangers, mais nous Ă©tions trĂšs Ă©tonnĂ©s par lâimage quâen avait les deux tiers des gens qui avaient pris le temps de rĂ©pondre Ă notre petite enquĂȘte.
Il suffit dâouvrir un manuel de formation Ă la plongĂ©e pour dĂ©couvrir le florilĂšge dâaccidents et leurs consĂ©quences possibles.
Liste non exhaustive et dans un ordre alĂ©atoire des joyeusetĂ©s qui peuvent survenir au cours dâune plongĂ©e : hypercapnie, essoufflement, noyade, paraplĂ©gie, hyperoxie, plaques cutanĂ©es, barotraumatisme, arrĂȘt cardiaque, hypoxie, nausĂ©e, narcose, quadriplĂ©gie, accident de dĂ©compression, saignement, vertiges, convulsions, hĂ©matomes, perte dâĂ©quilibre, tĂ©traplĂ©gie, dĂ©mangeaisons, douleurs, syncope, blocage articulaire, arrĂȘt ventilatoire, pneumothorax, emphysĂšme, hĂ©miplĂ©gie, embolies, fourmillements, paralysieâŠ
Pas de quoi se rĂ©jouir, voir mĂȘme : autant de motifs de partir en courant.
Nous avons donc décidé de faire un point sur cette question bien précise. Qui de mieux placé que DAN (Divers Alert Network) pour nous répondre ?
Le réseau International Divers Alert Network (IDAN) se compose de cinq organisations DAN indépendantes dans le monde (America, Europe, Japan, Southern Africa, Asia Pacific).
Ces cinq entitĂ©s sont engagĂ©es Ă poursuivre la mĂȘme mission et Ă mener leurs activitĂ©s selon les protocoles convenus par IDAN, en vue de fournir des services et une expertise Ă tout type de plongeurs, oĂč quâils se trouvent.
Chaque organisation DAN rĂ©gionale fonctionne comme une entitĂ© indĂ©pendante, sans but lucratif, et comptant sur le soutien des plongeurs locaux pour fournir des services aux plus de 400.000 membres DAN Ă lâĂ©chelle globale.
Les entitĂ©s rattachĂ©es Ă IDAN offrent des lignes dâappel dâurgence multilingues, des centres dâalerte, plus de 500 installations hyperbares, ainsi que des services de formation et de sĂ©curitĂ©Â fournis par des spĂ©cialistes et experts.
Rencontre avec Marco Di Tomasso (représentant francophone chez DAN Europe).
Depuis maintenant pas mal dâannĂ©e, en termes de risques encourus, la plongĂ©e est au mĂȘme niveau de dangerositĂ© que le bowling. Ăa peut faire sourire, mais les statistiques sont lĂ .
Donc, dans les faits, il nây a pas vraiment de gros risques dans la plongĂ©e si ce nâest que lâon est dans un environnement sous-marin. Et câest lĂ toute la diffĂ©rence avec beaucoup dâautres activitĂ©s. Une pathologie facilement prise en charge sur terre, des convulsions par exemple, peut avoir une issue tragique dans lâeau puisquâil y a le risque de noyade qui sâajoute, Ă©videmment.
Câest pour ça que lâon fait un examen mĂ©dical, qui a dâailleurs Ă©tĂ© revu rĂ©cemment, avec des questions plus pointues sur certains sujets, pour que les gens prennent conscience quâil y a des risques Ă plonger quand on est en mauvaise santĂ©, comme pour toute activitĂ©. Il y a un ensemble de rĂšgles Ă respecter : plonger avec un binĂŽme, avoir un matĂ©riel adaptĂ©, un matĂ©riel parfois doublé⊠Il y a aussi des rĂšgles pour les diffĂ©rents organismes de formation. Toutes ces rĂšgles ne sont pas lĂ pour rien. Elles doivent ĂȘtre respectĂ©es.
En plongĂ©e, les accidents mortels reprĂ©sentent 2% de lâensemble des accidents, câest trĂšs peu. Et souvent, ce sont des pathologies qui ne sont pas prises en compte correctement. Par exemple : une crise cardiaque sous lâeau, elle aurait pu survenir deux heures plus tĂŽt ou deux heures plus tard, mais peut-ĂȘtre quâun effort particulier a provoquĂ© lâaccident. Est-ce un accident de plongĂ©e ? Pas vraiment.
Au niveau mondial, lâaccident le plus frĂ©quent est le barotraumatisme, lâaccident liĂ© Ă la pression, qui survient dans les espaces aĂ©riens du corps et plus particuliĂšrement lâoreille.
Au niveau europĂ©en, lâaccident le plus frĂ©quent est lâaccident de dĂ©compression. Pour faire simple : une bulle va se loger Ă un endroit oĂč elle ne devrait pas ĂȘtre, dans le corps de la victime. Il y aurait beaucoup Ă dire, mais faisons simple. Cette bulle va provoquer des symptĂŽmes voire des sĂ©quelles chez la personne. Et ça, en Europe, câest la premiĂšre cause dâaccident que nous traitons.
Il faut savoir quâon reçoit 10.000 appels par an Ă travers le monde. La moitiĂ© de ces appels sont des urgences de prise en charge.
Pour 100.000 plongeurs, en Europe, on a :
Lâappel des profondeurs, peut-ĂȘtre !
LâeuropĂ©en aime aller profond.
Si vous avez dĂ©jĂ plongĂ© dans la zone amĂ©ricaine ou partout oĂč il y a beaucoup dâamĂ©ricains, tout est trĂšs rĂ©glementĂ©. Avec un brevet Open Water, ce sera 18 mĂštres maximum, 30 mĂštres avec un Advanced Open Water. La limite est stricte. Et exceptionnellement, pour la plongĂ©e tech ou avec des brevets particuliers, on peut aller plus profond.
En Europe, on a aussi beaucoup de plongĂ©es qui se font en autonomie, des plongĂ©es hors structure, plus profondes, tout ne se fait pas que dans les centres de plongĂ©es. Les plongeurs aiment aller plus profond. Et puis aussi : les sites. Si on plonge en MĂ©diterranĂ©e, pour voir une Ă©pave, câest souvent Ă partir de 40 mĂštres de profondeur, parfois 30.
Câest trĂšs documentĂ©, il y a des publications scientifiques sur le sujet. Chez DAN, nous avons des centaines dâĂ©tudes publiĂ©es et un sujet intĂ©ressant est celui de la prise de risque. On constate que les personnes qui ont fait trois accidents de dĂ©compression prennent plus de risques au cours du temps. Ils font un premier accident, nâen tire pas de leçon, et continue de plonger plus profond, avec des profils de plongĂ©e plus dangereux, ce qui mĂšne Ă un deuxiĂšme accident et ainsi de suite. Et souvent ils arrĂȘtent de plonger aprĂšs le troisiĂšme accident. Donc il y a aussi un profil psychologique qui peut jouer dans tout ça.
Mais le plongeur lambda, qui respecte les rĂšgles de la plongĂ©e loisir, limite grandement les risques. Tout peut arriver : des accidents surviennent aussi dans les limites de la courbe de sĂ©curitĂ© et le corps va saturer ou dĂ©-saturer en fonction de paramĂštres qui ne sont pas forcĂ©ment pris en compte par les ordinateurs de plongĂ©es. Mais la plongĂ©e est un sport safe : on est en binĂŽme, on a quatre dĂ©tendeurs, on a suffisamment dâair si la plongĂ©e est bien planifiĂ©e donc si on ne panique pas, il y a finalement assez peu de risques.
Si on analyse les accidents mortels, on constate que la cause primaire de lâaccident pourrait ĂȘtre gĂ©rĂ©e facilement : emmĂȘlement dans un filet ou des lignes de pĂȘche, Ă©quipement non adaptĂ©, panne dâair⊠Les faits nous montrent que ce sont les rĂ©actions Ă cette cause primaire qui mĂšnent Ă la mort de la personne. Car si les procĂ©dures sont suivies correctement, que le binĂŽme vient nous aider, que lâon a tout le matĂ©riel nĂ©cessaire et adaptĂ©, le problĂšme peut ĂȘtre gĂ©rĂ©, on reste calme. En cas de panique, les rĂ©actions peuvent ĂȘtre tragiques.
Ătre loin de son binĂŽme, une mauvaise rĂ©action du binĂŽme, un mauvais briefing dâavant plongĂ©e, pour dĂ©finir les conduites Ă tenir en cas dâurgence, si on se perd, etc. Ce sont autant de facteurs qui augmentent les risques dâaccident. Il faut anticiper et planifier la plongĂ©e, avec la gestion des risques et des procĂ©dures en cas dâurgence. Si ces sujets sont abordĂ©s, on rĂ©agira totalement diffĂ©remment, on saura quoi faire sous lâeau.
55% des accidents sont dus à des remontées trop rapides.
25% dus Ă une panne dâair.
12% dus à perte de flottabilité.
2-3% des accidents ont pour origine une défaillance matérielle.
1% sont dus Ă des emmĂȘlements ou des blocages dans des Ă©paves ou des grottes.
Dans les facteurs favorisant :
Le fait de pratiquer, mĂȘme en piscine est intĂ©ressant. Il faut maintenir une condition physique, acquĂ©rir des rĂ©flexes quant au matĂ©riel ou aux situations qui peuvent survenir. Si vous faites un vidage de masque Ă chaque entrainement en piscine, vous ne serez pas pris au dĂ©pourvu si ça vous arrive lors dâune plongĂ©e en mer. Ce sera une situation familiĂšre.
Câest aussi trĂšs intĂ©ressant et important de faire des formations de secourisme. Car malgrĂ© tout, les accidents arrivent. Si on est capable de rĂ©agir rapidement, faire un bilan neurologique, dĂ©livrer de lâoxygĂšne, on peut transformer une catastrophe en incident, mais on peut Ă©viter les sĂ©quelles lourdes en agissant rapidement.
Donc se former dĂšs les premiers niveaux nâest pas superflu, tous les citoyens devraient avoir ces compĂ©tences de bases.
Par exemple, chez DAN, nous avons fait des Ă©tudes en rĂ©alisant des Ă©chographies cardiaques de plongeurs, en avion, aprĂšs une semaine de plongĂ©e ou mĂȘme sous lâeau. Et on a constatĂ© que frĂ©quemment, il y a encore des bulles dans le sang, plus de 24 heures aprĂšs la derniĂšre plongĂ©e. Ce sont des bulles asymptomatiques, qui ne posent pas de problĂšme, mais câest important de savoir rĂ©agir dĂšs les premiers symptĂŽmes.
Lâhydratation est un point clĂ© aussi.
Quand vous allez plonger, le matin, il faut boire un verre dâeau toutes les 20 minutes, dĂšs le rĂ©veil. Tout le corps sera alors bien hydratĂ©, lâeau ira dans les cellules plutĂŽt que dâaller directement dans la vessie et le nombre de microbulles dans lâorganisme sera infĂ©rieur. Vous aurez donc paradoxalement moins envie de faire pipi pendant la plongĂ©e. Alors que si vous buvez juste un peu, pour justement ne pas avoir besoin dâaller aux toilettes, câest lĂ que vous Ă©liminerez trop vite.
Si vous avez soif, câest dĂ©jĂ trop tard. LâidĂ©e est vraiment de sâhydrater tout au long de la journĂ©e.
Autre facteur clĂ© : lâexpiration.
En plongĂ©e, on ne retient jamais sa respiration, on ne cherche jamais Ă Ă©conomiser son air. Au palier, lâimportant câest lâexpiration. Ce nâest presque pas la durĂ©e du palier qui est importante, mais le nombre de respiration que vous ferez au palier. Câest lĂ que lâazote va ĂȘtre Ă©liminĂ©, quâil sâagisse dâun palier de dĂ©compression ou dâun palier de sĂ©curitĂ©. La maniĂšre de respirer est donc cruciale.
Il sâagit souvent de contacts avec des coraux.
DAN propose dâailleurs une formation Hazardous marine life injuries, câest une formation courte que je recommande aux plongeurs qui voyagent afin de savoir quoi faire en cas de problĂšme. Il faut savoir que des blessures liĂ©es aux mĂ©duses ou au corail de feu, par exemple, peuvent continuer de gĂȘner prĂšs de 3 mois aprĂšs le contact. Une formation comme celle-ci, permet aux plongeurs, en quelques heures, dâavoir les connaissances de bases pour le cas oĂč lâon se frotterait Ă un corail, oĂč lâon aurait un filament de mĂ©duse sur la peau⊠Des petites choses qui peuvent ĂȘtre prise en charge de maniĂšre adĂ©quate, faute de quoi ça peut poser des problĂšmes pendant des semaines, sâinfecterâŠ
Chez DAN, nous avons voulu proposer ces formations pour sensibiliser les plongeurs : quâils Ă©vitent les coraux, quâils ne ramassent pas les cĂŽnes (coquillages) car ce sont des animaux trĂšs dangereux.
Les requins nâapparaissent mĂȘme pas dans les statistiques tant les incidents sont rares et exceptionnels. DAN propose plusieurs petites formations comme celle-ci. Il ne faut pas hĂ©siter Ă nous contacter. Nous proposons aussi des confĂ©rences dâinformation, des campagnes de sĂ©curitĂ©, gratuites pour les clubs et les associations.
Câest aussi la vocation de notre fondation : former et informer les plongeurs pour augmenter leurs connaissances et faire de la prĂ©vention.
Si les risques sont nombreux, sur le papier et en thĂ©orie, dans la pratique, les chiffres montrent que la plongĂ©e nâest pas un sport dangereux. A la condition de suivre et de respecter les rĂšgles, assez strictes parfois, mais qui nâont pas dâautres but que dâassurer une pratique sĂ©curisĂ©e de lâactivitĂ© plongĂ©e sous-marine.
Il convient donc de connaĂźtre les rĂšgles, dâĂȘtre conscient des risques, mais ne surtout pas penser que rien ne peut nous arriver ou que ça nâarrive quâaux autres. MĂȘme si on est hors des catĂ©gories statistiques Ă risques⊠Câest vrai pour la plongĂ©e sous-marine avec bouteille, mais ça sâapplique Ă©galement au snorkeling, discipline qui a elle aussi ses rĂšgles de sĂ©curitĂ©.
La formation est toujours un bon moyen dâapprendre, de pratiquer et de limiter les risques. Passer son niveau 1 (FFESSM) ou son Open Water (PADI, SSIâŠ) est un bon dĂ©but et peut mĂȘme ĂȘtre suffisant selon la pratique que vous avez.
Si vous souhaitez approfondir tout cela, vous pouvez consulter lâAnnual Diving Report de DAN pour lâannĂ©e 2019.
Le papa Padawan, a grandi et rĂȘvĂ© en regardant les Ă©missions de Cousteau.
Niveau 1, Advanced Open Water, Nitrox.
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