Initiation au recycleur en plongée : tout ce que vous devez savoir
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Dans le monde de la plongée, le recycleur est souvent considéré comme un « aboutissement », réservé aux plus expérimentés.
Pourtant, depuis un moment, nous étions curieux et pensions à découvrir la plongée en recycleur. Sans aucune autre prétention que de découvrir cette façon de plonger.
Alors quand Thibault Rauby, fondateur de Kraken Plongée, nous explique, dans le podcast qui lui est consacré, que le recycleur est accessible à tous, je saisis l’occasion.
Rendez-vous est donc pris pour une initiation rEvo (la marque de recycleur avec laquelle plonge Thibault), en ce début mai 2023, à La Ciotat.
Initiation rEvo chez Kraken Plongée
Chez Kraken, l’initiation recycleur compte trois temps :
- préparation du recycleur afin de comprendre le principe de fonctionnement de la machine
- première plongée de découverte avec quelques exercices basiques de sécurité. Pas d’inquiétude, rien de difficile. Il ne s’agit que d’exercices déjà effectués à terre, lors de la préparation de l’équipement.
- l’après-midi, seconde plongée : petite exploration sous-marine et approfondissement de l’utilisation du recycleur rEvo.
Il fait un grand soleil en ce début mai à La Ciotat. Presque 30°C en plein soleil. Seulement 14 dans l’eau !
Je ne regrette ni la combinaison 7mm que j’ai louée, ni l’investissement dans les chaussons.
La combinaison, deux pièces, est épaisse et j’ai 14mm de néoprène sur le buste. Sur le bateau, en route vers le spot de plongée, j’ai franchement peur d’avoir trop chaud, n’étant pas frileux.
Même si l’eau n’est qu’à 14°C, je ferai rentrer un petit filet d’eau par le col pendant chacune des deux plongées. Aucun regret pour la grosse combi, il vaut mieux que ce soit dans ce sens là, plutôt que d’avoir froid et de devoir mettre un terme aux plongées.
Préparation du recycleur rEvo
La journée commence donc par la préparation du recycleur et les explications de base sur son fonctionnement.
Vous voulez savoir comment fonctionne un recycleur ? On vous dit tout ici.
Une fois assimilées les différences entre circuit ouvert et circuit fermé, nous faisons un tour rapide de l’ordinateur Shearwater qui équipe le recycleur rEvo. En plus de montrer les paramètres standards de plongée (profondeur, durée…), l’ordinateur affiche les résultats de la mesure de trois cellules à oxygène situées à l’intérieur de la machine. On sait donc en temps réel quelle est la pression partielle de O2 dans le gaz que l’on respire. Et c’est très important, car l’oxygène peut devenir toxique en fonction des conditions.
Diluant et oxygène en place sur la machine, manomètres vérifiés, ordinateur calibré : on va pouvoir effectuer quelques manœuvres telles que le vidage/purge de la boucle respiratoire et manipuler la « clarinette » permettant d’injecter du gaz dans la boucle : de l’air (le diluant dans notre cas) et/ou de l’oxygène.
La première plongée en recycleur
Une fois les blocs de secours prêts et vérifiés, nous sommes prêts à embarquer.
Car même si le rEvo est une machine fiable et que nous n’allons pas faire une plongée très engagée (il s’agit d’une plongée de découverte), chaque plongeur embarquera avec lui un bloc de secours, contenant de l’air, équipé d’un détendeur classique.
En effet, comme toujours en plongée : sécurité avant tout.
La suite de l’histoire démontrera l’impériosité de toujours penser à la sécurité. 🤯
Prise en main du recycleur
L’objectif de cette première plongée est donc d’assimiler le fonctionnement d’un recycleur et les particularités de plonger en circuit fermé. Notamment : pas de poumon ballast avec un recycleur puisqu’il n’y a pas de variation de volume à l’inspiration ou à l’expiration : le volume des poumons étant transféré vers les sacs respiratoires du recycleur, et vice versa. En revanche, à la descente, le volume de gaz dans la boucle respiratoire se comprime, il convient donc de rajouter régulièrement du gaz tout au long de la descente, en veillant à maintenir un pression partielle d’oxygène (PPO2) adaptée.
A la remontée, c’est l’inverse qui se produit : le gaz dans la boucle respiratoire se détend et il faut donc en évacuer (simplement en soufflant par le nez).
En plongée recycleur, l’équilibre et la stabilité s’obtiennent donc en adaptant le volume de gaz dans la boucle respiratoire et avec le gilet stabilisateur. Pas avec le poumon ballast comme on peut le faire en plongée classique, avec bouteille et détendeurs.
Quelques exercices de sécurité
Parmi les exercices de sécurité effectués, le passage sur le bloc de secours.
C’est assez simple :
1° on attrape son détendeur ;
2° on ferme l’embout de la boucle du recycleur pour éviter que l’eau n’y rentre et aille « noyer » les cassettes contenant la chaux ;
3° on lâche l’embout buccal du recycleur ;
4° on respire dans le détendeur du bloc de secours.
On effectue l’opération inverse pour repasser sur le recycleur :
1° inspiration dans le détendeur ;
2° reprise de l’embout buccal du recycleur ;
3° ouverture de l’embout ;
4° expiration puis respiration dans la boucle du circuit fermé.
Tout ça peut sembler un peu complexe, mais ce n’est jamais qu’une manœuvre de lâcher-reprise d’embout, telle qu’on la travaille dès le niveau 1 en plongée classique. Avec quand même une ou deux petites choses particulières. 😅
Pourquoi chaque plongeur doit avoir un bloc de secours
Après environ 50 minutes de plongée, alors que nous remontions tranquillement vers la surface, je commençais à avoir du mal à inspirer et regonfler ma stab. Je décidais donc de passer sur mon bloc de secours (merci l’exercice de sécurité pratiqué précédemment). Je palmais un peu plus rapidement, pour rejoindre Thibault et lui indiquer mon problème.
Ne faisons pas durer le suspens : j’avais simplement vider mon bloc de diluant, qui sert à la fois à respirer et à gonfler la stab. Je n’ai pas été très attentif, trop occupé à essayer de « dompter » la machine que j’avais sur le dos et à faire quelques photos et vidéos de ma plongée. J’ai aussi pas mal « joué », en expirant par le nez, pour comprendre les effets des changements de volume de gaz dans la boucle.
Comme m’ont dit les moniteurs : j’ai fait trop de bulles. 😉 Un comble.
Tout s’est très bien passé, je suis facilement passé sur mon bloc de secours, nous étions en fin de plongée et je n’étais évidemment pas seul.
Si vider le bloc de diluant est très rare, ce qui m’est arrivé sonne surtout comme un rappel : tout peut arriver, la sécurité doit toujours primer.
Cette première plongée aura duré un tout petit peu moins d’une heure avec une profondeur max de 27m.
La profondeur max, le profil et la durée de la plongée n’ont pas donné lieu à des paliers de décompression.
Seconde plongée en recycleur : exploration
Après un sympathique déjeuner avec l’équipe et le regonflage de mon bloc de diluant vide, direction le port pour la plongée de l’après-midi.
L’objectif de la plongée matinale était de découvrir le recycleur et les sensations qu’il procure en plongée.
Cette après-midi, nous allons nous balader et essayer de garder une pression partielle d’02 à 1 tout au long de la plongée. Cela permet une marge de sécurité confortable par rapport au seuil de dangerosité de 1,6 et cela permettra de ne pas avoir de palier à faire. Et c’est presque dommage : on aurait pu en profiter pour écouter des podcasts grâce au caisson pour smartphone de Divevolk.
A titre perso, j’ai aussi pour objectif de ne pas vider ma bouteille de diluant pour cette seconde plongée. 😂
Il n’y a pas de raison : j’ai pu comprendre le fonctionnement de base du recycleur ainsi que des phénomènes de volume et de pression dans la boucle respiratoire. Donc l’après-midi va bien se passer.
Et effectivement, notre balade sur le spot de l’Ile Verte, dans la baie de La Ciotat va être très sympathique. Nous verrons notamment deux bons gros mérous bien dodus posés sur le fond sableux, des murènes, poulpes, girelles, castagnoles…
Aucune panne d’air à signaler. 🥳
Cette seconde plongée nous aura permis de rester une heure en immersion, avec une profondeur max de 33m.
Là encore, pas de paliers nécessaires compte tenu de la profondeur max, du profil et de la durée de la plongée, la concentration en oxygène étant ajusté « en temps réel » en fonction de la profondeur tout au long de l’immersion.
Evidemment, le principe même du recycleur nous aurait permis de rester sous l’eau plus longtemps, mais les meilleures choses ayant une fin, il fallait bien remonter à un moment. On ne cherchait évidemment pas à réaliser une performance. Et puis il fallait rentrer au port, débarquer tous les équipements, tout rincer et ranger…
Note importante : en plongée loisir (scaphandre et air comprimé « classique »), effectuer – dans la même journée – une seconde plongée plus profonde que la première aurait donné lieu à des paliers. Ca n’a pas été le cas ici compte tenu du fait que la concentration en oxygène est en permanence optimisée tout au long de la plongée.
Impressions et ressentis
Ca a été une expérience très intéressante.
Flottabilité
D’abord, pour le plongeur bouteille que je suis, la perte du poumon ballast est au départ assez troublante. Je m’y suis assez rapidement habitué. Avec le poumon ballast, on prend une grande inspiration et on monte dans la colonne d’eau (inversement si on expire). En recycleur : une fois stabilisé à une profondeur donnée, inspirer ou expirer fortement ne modifiera en rien la flottabilité.
Pour cela, il faudra jouer avec la stab et/ou le volume d’air dans la boucle respiratoire. Et le moyen d’éliminer du gaz de la boucle respiratoire est simple : il suffit de souffler par le nez, tout doucement. Un peu comme quand on expulse l’eau de son masque après un vidage, mais en plus doux.
Vraiment, dans le cadre des plongées de cette initiation : on s’y fait très vite.
Equilibre
C’était la première fois que je plongeais avec une wing. Ce n’est pas un gilet stabilisateur classique, juste un harnais basique (des sangles) et une vessie qui se gonfle dans le dos. Une fois bien ajusté, je retrouve à peu de choses prêt les sensations que j’ai avec mon petit gilet Rogue d’Aqualung. Les poches de rangement et à plombs en moins.
Les sangles permettent de bien ajuster la position de la machine sur le dos et au final c’est très confortable.
Même le bloc de sécurité accroché sur le côté n’a pas été un gros souci, je m’y suis bien habitué.
Equipement
C’est souvent ce qui impressionne. Et je dois avouer que quand Thibault nous a montré tout le matériel, le matin avant de plonger, je me suis dit que ça aller être compliqué de gérer tout ça. Finalement, rien de franchement extra-ordinaire.
On retrouve un système de gonflage pour la stab/wing (direct system identique à n’importe quelle stab classique).
Le détendeur est remplacé par un embout buccal avec deux flexibles (inspiration / expiration).
Comme on a deux bouteilles (une de diluant et une d’oxygène), on a deux manomètres. Car si la plongée n’est pas foncièrement un sport dangereux, on aime avoir tout ce qu’il faut pour contrôler et prendre les décisions adaptées le cas échéant.
L’injection de gaz (air/diluant et oxygène) se fait grâce à une « clarinette ». C’est un peu comme un gros inflateur de stab, mais avec plusieurs boutons pour injecter plusieurs gaz, pas dans une stab, mais dans la boucle respiratoire.
L’ordinateur du recycleur est un peu particulier. En plus de toutes les informations de base, il affiche des informations sur la pression partielle d’O2 « en temps réel » (avec une petite inertie). Ce sont ces informations sur la pression partielle d’oxygène qui indiquent quand et « combien » injecter d’oxygène dans la boucle respiratoire. Cet ordinateur, porté au poignet, bénéficie même d’une redondance concernant l’affichage des ppO2 des différentes cellules puisque qu’un ordinateur rEvodream est aussi disponible sous la forme d’une console avec le manomètre de la bouteille d’oxygène.
Et enfin, sécurité oblige, chaque plongeur est également équipé d’un bloc d’air avec détendeur classique.
Dans le cadre de cette initiation, aucun problème de gestion / compréhension de l’équipement. Par contre, j’ai bien compris la nécessité absolue pour les plongées engagées d’avoir un recycleur configuré parfaitement avec des instruments faciles à trouver.
Déplacement sous l’eau
Bien qu’elle semble volumineuse, la machine n’est pas une entrave aux déplacements sous l’eau. Ca reste relativement hydrodynamique.
Une fois stabilisé à une certaine profondeur, on glisse sous l’eau, avec très peu d’effort. C’est encore plus flagrant qu’en plongée bouteille puisque là, aucune variation de flottabilité n’a lieu à l’inspiration ou à l’expiration. C’est très agréable.
Et finalement, la quantité de matériel n’est absolument plus un obstacle (poids et encombrement) une fois dans l’eau. Il suffit de bien repérer où se trouve chaque élément.
Je garde un très bon souvenir de cette journée passée avec l’équipe Kraken Plongée. Equipe sympa, accueil convivial, beau temps et plongée. Que demander de plus ?
Encore une fois, je vous fais part de mon expérience dans le cadre d’une initiation. Les plongées n’étaient pas engagées, les conditions étaient bonnes, tout allait bien. Ca n’a rien à voir avec les plongées que les membres des expéditions Gombessa ont pu nous raconter dans notre podcast.
Si vous êtes curieux et que vous souhaitez découvrir la plongée en recycleur, n’hésitez pas à contacter Justine ou Thibault Rauby, chez Kraken. Ou un club spécialisé plus proche de chez vous ou d’un futur lieu de vacances.
La plongée en recycleur est vraiment une expérience nouvelle qui nécessite de prendre de nouvelles habitudes et réflexes, mais ça vaut le coup. Les bulles de votre détendeur n’effraient plus les poissons. Vous n’avez (presque) plus à vous préoccuper de votre consommation d’air. Vous respirez naturellement et le recycleur s’occupe de presque tout.
Le papa Padawan, a grandi et rêvé en regardant les émissions de Cousteau.
Niveau 1, Advanced Open Water, Nitrox.